Expérience de ma Semaine « qui suis-je comment m’aimer » octobre 2019
Suite à mon divorce ma relation à ma fille cadette, s’est beaucoup dégradée, même si c’est mon ex-mari qui est parti, ma plus jeune fille a beaucoup souffert de ce divorce et s’est éloignée de moi tout en restant très proche de son père.Je souffre de ce manque de contact, de nouvelles qu’elle ne me donne presque plus.
Dans ce dialogue miroir avec la nature mon regard s’arrête sur une barrière rafistolée qui ne fermait pas vraiment et laissait des ouvertures possibles. Ce qui me touche c’est qu’alors qu’un cadre soit posé et défini, que l’on puisse trouver des échappées possibles de partout.
En fait, ça parle de moi, de partout dans ma vie : Je suis celle qui a peur d’être prise, celle qui a besoin pour pouvoir se sentir en sécurité de voir qu’il y a une issue de repli, devant des situations insupportables.
Il m’est alors revenu un souvenir en lien avec ce traumatisme :
J’ai 19 ans, c’est un dimanche midi, mon père est très malade (grave problème cardiaque) Toute la famille : mes grands frères, leurs épouses et ma mère, sont réunis autour du déjeuner, mon père reste alité sur le sofa de la salle à mange, il n’a pas la force de s’assoir avec nous à la table. Au dessert, mon père fait un effort pour se redresser et me dire : « Pourquoi tu nous a pas dit que tu as un copain, je pensais que tu avais plus d’ambition que ça, c’est pas un garçon pour toi ! » J’ai reçu cette phrase comme un coup au cœur, je me sentais comme un lièvre pris dans les phares d’une voiture !
Cela faisait 1 an, que j’avais une relation cachée avec celui qui deviendrait plus tard mon mari et le père de mes enfants. Très différent de mon milieu familial, je le voyais en cachette et ne l’avais présenté que quelques semaines auparavant à mes frères lors d’un repas. J’avais cru naïvement que mes frères garderaient le secret.
Je menais jusqu’à ce jour « une double vie », pour me préserver des reproches de mes parents, garder ma liberté et vivre ma vie comme je l’entendais. Lors de ce dimanche, je me suis sentie démasquée.
A travers ce souvenir, j’ai vu la Petite en moi, comment depuis l’âge de 14/15 ans, je me suis ménagée une double vie, car c’était trop difficile et insupportable de rentrer dans le moule que mes parents avaient prévu pour moi, c’était un cadre qui m’étouffait.
Alors je menais une double vie, pour ne pas les décevoir et les préserver, ne pas les inquiéter.
J’ai vu aussi l’amour de mon père qui voulait le meilleur pour moi : une belle situation, un beau mariage pour me mettre à l’abri de tous soucis.
La petite était tellement perdue, elle n’osait pas tenir tête à ses parents, ni les envoyer promener ouvertement. Elle avait aussi peur de ne plus être aimée si elle parlait ouvertement de son monde qui sortait du cadre pré-établi par ses parents. Elle préservait sa mère pour ne pas lui faire de la peine et son père, eux qui avaient déjà tellement du fil à retordre avec mon grand frère, qui ne réussissait pas dans la vie. Elle achetait la paix de sa famille et la sienne.
Dans ce souvenir je suis tombée en amour pour cette petite qui pour sauver sa peau, avait trouvé cet unique fonctionnement de mener « une double vie ».
Ce souvenir vient également éclairer là où je souffre aujourd’hui dans la relation à ma fille. Aujourd’hui ma fille de 22 ans ne me donne pas de nouvelles, elle veut préserver son cocon dans lequel je ne rentre pas, c’est sa vie intime, son jardin secret, seul son père à accès à qui elle est, et à ce qu’elle vit mais pas moi. Moi Catherine je me sens comme l’abandonnée, la rejetée.
J’ai passé de : « elle n’a pas le droit :
de ne pas donner de news à sa mère, après tout ce que j’ai fait pour elle
de me fermer la porte alors qu’elle l’ouvre à son père
de m’appeler que quand elle a besoin d’argent
de me renier moi et d’être reliée à son père
A « elle a le droit » :
de ne pas répondre à mes sollicitations (sms, courrier..)
de mener son existence comme elle l’entend
d’avoir une vie sans moi
d’être tellement loyale à son père, qu’elle mette de côté sa mère
J’ai pris conscience que ma fille vit un monde semblable au mien, elle mène une double vie, où je n’ai pas à rentrer dans son intimité. Elle se construit son cocon, comme moi, qui à l’époque voulait laisser mes parents en dehors de ma vie. Comme je la comprends, son monde si proche du mien ! Ma souffrance s’apaise alors, jusqu’à respecter sa façon de vivre et son silence.
En Acte je lui envoyé le livre, issu du film que nous aimions voir quand elle était petite : « Va,vis,deviens ». J’aurais aimé lui dire ces mots, plutôt que mes maladresses d’une maman en souffrance, qui essayait de la retenir au lieu de l’encourager à prendre son envol et vivre sa vie.
Depuis l’envoi de ce courrier, je l’ai revue à l’anniversaire de mon père, j’ai été plus respectueuse de son silence, sans chercher à savoir ce qu’elle vivait, ni quand je la reverrai.